Dernière fenêtre sur l'Aurore
Editions : Mnémos (Hélios) (2015)
248 pages
Résumé : Il y a cet immense bunker isolé où quatre hommes retenus captifs sont systématiquement avilis et torturés.
Il y a la belle Aurore Boischel, dix-huit ans, jeune fille de bonne famille, qui gît sur son lit, morte. Assassinée.
Il y a ce détective privé embauché par un inconnu pour filer... un policier.
Et il y a Bernard Longbey, le flic revenu de tout, qui sait que la petite bourgade de Bois-Joli est devenue une toile de mort et de folie où l’araignée attend sa proie...
Extrait : Des photos qui font monter des larmes aux vieux tandis que la pluie martèle indéfiniment leurs vitres, leurs murs, aussi lézardés que les ridules qui dévorent leur visage.
Chronique
C'est un roman sombre (noir, c'est le cas de le dire !), et vraiment oppressant. J'ai tardé à en écrire une critique, car il m'a vraiment laissé une drôle d'impression, et même maintenant je ne pense pas pouvoir mettre des mots sur mon ressenti. Je vais tout de même tenter de décortiquer un peu tout cela en abordant les deux points qui me semblent réellement en son coeur : l'ambiance et les personnages.
Ce n'est pas un polar dans le sens consensuel du terme, car même si meurtre et enquête sont là, ils ne sont pas centraux. C'est réellement l'histoire d'un/des homme(s) qui… pètent un voire plusieurs plombs, mais le terme n'étant pas très poétique, disons plutôt : qui perdent pied avec la réalité. J'ai aimé suivre cette évolution, même si je dois dire que j'ai parfois été mal à l'aise. L'ambiance est vraiment oppressante, et cela tient aussi grandement au travail du personnage principal : flic pour la Brigade de Protection des Mineurs. J'ai eu soudain une révélation : je n'avais jamais lu de polar où le personnage principal travaillait là-dedans, à chaque fois, ça avait été la Crim. Et on peut dire que ça fait son effet. Je n'aurais qu'un mot pour le décrire : sordide. Ah si, peut-être aussi : horrifiant.
La première partie du roman est plutôt lente au niveau du rythme, il n'y a pas vraiment d'action, mais c'est ce qui permet d'instaurer cette ambiance si particulière : ça stagne, comme une eau marécageuse, trouble et nauséabonde. Pour rester en ces termes : le personnage principal semble comme embourbé, dans ses pensées, ses cauchemars, ses peurs.
Dans la deuxième partie, le rythme s'accélère d'un coup et il n'est plus question de lâcher le livre avant la fin. J'avais trouvé le coupable un peu avant la révélation (ça m'avait fait tilt, il manquait une seule petite pièce pour que le puzzle soit reconstitué). Mais ça ne m'a pas dérangée, parce qu'au final, le roman suit une ligne logique, qui fait un peu figure d'inéluctabilité, et les personnages sont tels qu'il ne pouvait en être autrement. L'identité de celui-ci renforce encore la cruauté ambiante, car finalement, personne n'est bon, ni gentil.
Ce qui est aussi assez étonnant dans ce roman, c'est que les femmes y sont toutes absentes (mortes ou parties), alors même qu'un personnage très central (Aurore) est finalement omniprésent. Même Virginie est souvent en arrière-plan. Des personnages absents donc, tout en étant très présents. Les hommes, eux, semblent tous habités par une certaine violence contenue (ou non, d'ailleurs). Je les ai trouvés assez fouillés, surtout pour un roman finalement assez court.
Bref, pour conclure, je dirais que c'est un roman qui ne laisse clairement pas indifférent et qui hante, tout autant que son personnage principal est hanté.